Ferrari 348, un cheval sauvage…

Histoire et revue de presse d’une Ferrari à la réputation sulfureuse

Succédant aux célébrissimes 308 et 328, la Ferrari 348 est apparue en 1989. GT Spirit vient de présenter une reproduction au 1/18ème de la version GTB commercialisée en 1993. L’occasion pour moi de vous parler de cette superbe 348 qui a souffert pendant toute sa carrière d’un comportement délicat et d’une concurrence forte de la Honda NSX.

Ferrari 348 – photo Ferrari

C’est en 1989, au salon de Francfort, que Ferrari présente la première Ferrari de l’après Enzo, la 348. Cette dernière doit prendre la succession de la 328, une Ferrari qui n’était pas exempte de défauts mais qui jouissait d’une beauté sculpturale.

D’ailleurs, au premier abord, les Tifosi semblent déçus tant cette nouvelle Ferrari semble lisse et sans grâce face à la 328. Pourtant la magie opère rapidement et nombreux s’accordent à trouver belle cette 348 issue des studios de design de Pininfarina. Avec ses grilles latérales, sa ligne présente un air de famille certain avec la Testarossa. La partie avant évoque quant à elle la célébrissime F40 (lire aussi l’histoire de la F40 sur le site de lov4wheels).

Dès l’officialisation de l’arrivée sur le marché de la 348 TB et de sa version à découvrable, la 348 TS, les acheteurs – et spéculateurs – se précipitent et les carnets de commande se remplissent à tel point que les délais de livraison atteignent très rapidement trois ans !

Les Ferrari 348 TB et TS au moment de leur présentation officielle – photo Ferrari

Il faut dire qu’au-delà de sa ligne, cette 348 se distingue notamment par son V8 envoutant de 3,4 litres développant la puissance de 300 ch. Il permet à la 348 d’atteindre la vitesse de 275 km/h et d’abattre le 0 à 100 km/h en 5,6 sec.

Rompant définitivement avec sa devancière, elle héberge sous sa carrosserie une structure autoportante sur laquelle est fixée un berceau tubulaire accueillant le moteur, la boite de vitesses et le train arrière.

« La 348, nous dit André Costa dans l’Auto Journal n°19 du 1er novembre 1989, est une petite voiture. Sa longueur hors-tout ne dépasse pas 4,23 mètres, soit un centimètre de moins qu’une BX Citroën, et sa hauteur est seulement de 1,17 mètres. Au reste, l’accessibilité n’est pas la vertu primordiale de la voiture […] Comme sur la 328, on ne peut pas dire non plus que le volant, le siège et les pédales soit alignés très précisément mais le corps trouve tout seul la position idoine ».

Malgré l’absence de direction assistée, la 348 bénéficie d’un bon niveau d’équipement et jouit d’une meilleure qualité de finition que la 328. Mais tout ceci n’est rien face au moteur, une véritable pièce d’orfèvrerie, qui fait l’admiration de tous par sa puissance, sa technologie moderne et le son métallique qu’il délivre. A la fois onctueux et rageur, ce moteur est typiquement Ferrari tout comme l’incontournable grille métallique de la boite de vitesses.

L’incontournable grille métallique de laquelle émerge le levier de vitesses de la 348 – photo Ferrari

Malheureusement cette 348 a fortement grossi et son poids s’élève à 1500 kg, 40 de plus qu’une 911 Turbo et 140 de plus que la Honda NSX à laquelle la 348 est régulièrement confrontée. La 348 est ainsi – sacrilège ! – moins performante que la japonaise et surtout, sa tenue de route sportive – qui a dit délicate ? – lui cause rapidement une réputation de cheval sauvage.

Il est clair que le survirage est excessif, car le contrebraquage en courbe d’autoroute reste tout de même du domaine des excellents pilotes, et même ceux-là ne cherchent généralement pas à abuser de ce genre de plaisirs.

Jean-Jacques Cornaert, Le Moniteur Automobile n°969, janvier 1991

C’est ainsi qu’en décembre 1989, Henri Pescarolo écrit, dans l’Action Automobile n°339, que « la 348 est un rêve de maniabilité. Elle est d’une vivacité extraordinaire pour changer de cap. […] Par contre, à peine en appui, elle part dans des dérives généreuses du train arrière. C’est un vrai bonheur mais, étant donné la dureté de la direction, il ne faut pas être fainéant pour attaquer sur les petites routes. Malheureusement elle possède les mêmes caractéristiques dans les courbes rapides et j’ai bien peur que beaucoup de conducteurs n’aient pas le talent nécessaire pour contrôler de telles situations ».

Cet avis est partagé par Jean-Jacques Cornaert dans le cadre d’un comparatif opposant en janvier 1991 la 348 à la Porsche 911 Turbo et à la Honda NSX publié dans le n°969 du Moniteur Automobile « […] les techniciens italiens ont peut-être été un peu loin dans la recherche de la meilleure maniabilité. Car si la 348 se révèle particulièrement agile dans les virages serrés, où le conducteur ne décèle jamais la moindre trace de sous-virage, que ce soit à l’inscription comme à l’accélération, il faut maintenant se méfier de la vivacité du train arrière. Dans les passages lents et à condition de faire une croix sur l’efficacité pure, cela ne pose pas vraiment de problème. Le conducteur habile profitera au contraire de cette caractéristique pour régler en quelque sorte son angle de dérive en fonction de sa trajectoire en agissant sur le volant et l’accélérateur. En revanche, cela se gâte sérieusement en courbe rapide, où la 348 ne se départit pas de ses velléités à engager systématiquement vers la corde. Dans ce cas, il est clair que le survirage est excessif, car le contrebraquage en courbe d’autoroute reste tout de même du domaine des excellents pilotes, et même ceux-là ne cherchent généralement pas à abuser de ce genre de plaisirs. Et lorsqu’il se trouve un camion sur la voie de droite, cela devient franchement un mauvais moment à passer… ».

Une confrontation qui ne manque pas de piquant dans Le Moniteur Automobile (archives lov4wheels)

Au final, nous dit Jean-Pierre Jabouille dans le numéro 521 de l’Automobile Magazine publié en novembre 1989, la 348 est « une voiture vive, facile à domestiquer et agréable à conduire dont le plus gros défaut provient sans doute de son caractère trop survireur ».

Conscients de ce comportement délicat, les ingénieurs de Maranello s’attachent à faire évoluer au fur et à mesure la 348. Les premiers modèles produits sont rappelés et retouchés au niveau du berceau arrière.

En 1993, Ferrari présente la 348 Spider, version décapotable de la 348. La marque en profite pour commercialiser les nouvelles 348 GTB et GTS qui succèdent aux TB et TS.

Voici le Spider – photo Ferrari

Dans le numéro 903 d’Auto Hebdo publié le 20 octobre 1993, Jean-François Marchet revient sur les raisons qui ont poussé Ferrari à commercialiser cette nouvelle version de la 348 « quand le moment est venu, à la fin des années 80, de remplacer la 328 GTB, Ferrari a opté pour un cahier des charges résolument axé sur un caractère très sportif. […] Ainsi est née la 348 TB. Un grand nombre de journalistes et de clients ont été surpris par son comportement on ne peut plus vif. Un vrai cheval sauvage. Les ingénieurs de Maranello ont fait preuve de leur compétence en reconnaissant qu’ils étaient allés trop loin. Ils se sont immédiatement remis au travail, retouchant de nombreux détails. […] La synthèse de ces modifications conjuguée avec un moteur plus puissant et quelques détails de présentation mis à jour nous donnent aujourd’hui la 348 GTB, une 348 arrivée à l’âge adulte après quatre ans de travail acharné et constructif. […] Tout a donc été fait pour rendre la 348 plus facile à vivre, sans nuire à son caractère ni à son efficacité ».

La GTB fait la Une de Auto Auto (archives lov4wheels)

Au-delà des nombreuses évolutions touchant aux liaisons au sol (suspensions, fixations et points d’ancrage, tarage des amortisseurs, pneumatiques), la GTB hérite également d’un nouveau moteur de 3,4 litres qui, avec ses 320 ch, développe 20 ch de plus que la TB.

A l’extérieur, la GTB bénéficie de bas de caisse couleur carrosserie en lieu et place du traitement noir initial. L’intérieur n’est pas en reste et accueille de nouveaux sièges et contre-portes ainsi qu’un pédalier en alliage léger. Enfin, la direction assistée fait son apparition !

La 348 GTB est une pure, une authentique sportive. Parfois dure et rude mais générant des sensations sans égal.

Alain Bernadet, Sport Auto n°382 – novembre 1993
Ferrari 348 GTB – photo Ferrari

Et au volant… cette Ferrari est-elle toujours aussi sauvage ? D’après Alain Bernadet qui, pour Sport Auto (n°382, novembre 1993), compare la GTB à la 911 Carrera et à la Honda NSX, « la 348 GTB est une pure, une authentique sportive. Parfois dure et rude mais générant des sensations sans égal. Une fois dans sa vie au moins, il faut vivre ce moteur à la sonorité très mécanique, au tempérament très affirmé. […] La Ferrari 348 GTB voit également son comportement progresser de façon sensible. […] La petite berlinette Ferrari est devenue plus abordable. Pas facile pour autant, s’agissant d’une voiture assez physique à l’usage. Il faut lui imposer sa volonté, la placer avec énergie. Mais, survirant avec moins de promptitude, son équilibre est devenu excellent, son freinage puissant et très endurant ».

Laquelle choisir ? Cruel dilemme ! (archives lov4wheels)

Dans Auto Hebdo, Jean-François Marchet écrit que « dès les premiers tours de roues on découvre un sentiment de confiance que l’on n’avait pas connu en 1989 sur route ouverte. A commencer par une vraie stabilité en ligne droite, une sensibilité moins marquée en appui et lors des transferts de masse. Cela veut dire désormais qu’une conduite rapide sur route ouverte peut maintenant se vivre sans arrière-pensée. Sur piste, notre jugement est plus nuancé car les réactions sont encore vives lorsque l’on flirte franchement avec la limite. La 348 ne doit pas être provoquée mais menée avec douceur, tel un fauve que l’on a apprivoisé. Passionnant assurément mais gare. […] La révélation de cet essai vient d’un comportement routier qui est maintenant proche de l’idéal ».

Malgré les commentaires beaucoup plus élogieux à l’encontre de la 348, les ingénieurs de Ferrari ne baissent pas les bras et poursuivent avec persévérance leur travail sur la structure de leur berlinette.

En 1994, un an après la commercialisation des GTB et GTS, ces dernières s’effacent pour laisser la place à la Ferrari F355. Profonde évolution de la 348, cette dernière en gomme tous les défauts et devient, dès son lancement, LA référence.

La NSX et la 911 Turbo n’ont qu’à bien se tenir, Ferrari a repris le pouvoir !


La miniature

Les fans de Ferrari sont gâtés ! Après la 308, la F40 et la 456 GT, GT Spirit commercialise la 348 dans sa version GTB. Uniquement disponible en rouge, cette dernière a été éditée à 999 exemplaires numérotés.

La présentation détaillée de cette miniature est à lire dans la rubrique Voitures miniatures.


Dans ma bibliothèque

Si vous souhaitez en savoir plus sur l’histoire de la Ferrari 348, je vous conseille la lecture du livre Ferrari 308, 328 and 348, the complete story écrit par Robert Foskett. C’est aujourd’hui le seul ouvrage disponible sur le sujet.

Ce dernier est écrit en anglais.


La Ferrari 348 en vidéo

L’essai realise par Turbo en 1991
Une jolie Ferrari 348 vue sur POA

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